L’Union Européenne, l’OCDE et la Banque mondiale recommandent une architecture du système de retraite en trois piliers : le premier, universel en répartition, le deuxième, professionnel en capitalisation et le troisième, individuel en capitalisation.
$Le système de retraite de chaque pays est profondément marqué par l’histoire et les choix politiques successifs. La classification en trois piliers permet certes d’effectuer des comparaisons, mais la diversité est telle que le modèle théorique ne trouve qu’exceptionnellement son application.
Dans les mois qui viennent, la France va une nouvelle fois entamer une réforme de son système de retraite et il est utile de clarifier, d’une part ce que cette classification recouvre et d’autre part de mesurer en quoi la France correspond, ou non, au modèle théorique.
Le premier pilier
Il a une vocation universelle pour l’ensemble d’une population, est géré par l’Etat ou sous une tutelle étroite de celui-ci.
Il est géré en répartition dans l’écrasante majorité des cas, c’est-à-dire que les prestations versées ne résultent pas d’un capital préalablement accumulé mais de ressources courantes. Ces ressources peuvent être des cotisations versées par les travailleurs et/ou leurs entreprises ou provenir du budget national. Les deux sources de financement peuvent dans certains être combinées : l’Etat complétant les versements contributifs si ceux-ci sont insuffisants. Il a vocation à être équilibré : sauf lissage dans le temps pour anticiper les évolutions démographiques ou les aléas de la conjoncture, les ressources égalent les prestations. Il est donc, du moins en théorie, aisément pilotable par augmentation des ressources ou réduction des prestations.
Deux modèles de prestations
Les régimes du premier pilier se répartissent entre régimes « beveridgien » du nom de Lord Beveridge auteur d’un rapport qui a inspiré le gouvernement britannique ou « bismarckien » du nom du Chancelier de l’Empire allemand qu’il est inutile de présenter.
- Le premier modèle distribue à chaque bénéficiaire un montant uniforme quel qu’ait été sa rémunération. Il est modulé en fonction de la durée des services (cas de la Grande Bretagne par exemple) ou de la durée de séjour dans le pays (cas des Pays-Bas ou des pays scandinaves). Il se rapproche d’une notion de revenu minimum destiné à faire échapper ses bénéficiaires.au risque de grande pauvreté
- Le second modèle prend en compte la durée des services et le montant des rémunérations. Il se rapproche d’un modèle d’assurance et est un reflet de la carrière.
Une amplitude limitée
Pour les régimes de premier pilier du type béveridgien, les montants de pension sont modestes, WWW £ en grande Bretagne pour 40 ans de cotisation, 950 € aux Pays-Bas pour 50 ans de présence dans le pays.
Il en est de même pour les régimes de premier pilier du modèle bismarckien pour la raison qu’ils ne prennent en compte qu’une fraction de la rémunération (par équivalence, disons entre une et deux fois le plafond annuel de la Sécurité Sociale française qui est de 36 372 €) et procurent un taux de remplacement n’excédant guère 50 %.
Revenu minimum des personnes âgées
La modestie des montants des pensions de premier pilier conduit souvent à mettre en place des systèmes de revenu minimum qui entrent dans le domaine de l’assistance, sortent du champ de la retraite à proprement parler et ne sont pas traités ici.
Le second pilier
Obligatoire mais limité
A la différence du premier pilier, le régime de second pilier n’a pas de vocation universelle. Il est néanmoins obligatoire, mais son champ d’application est limité. Ce champ peut être une entreprise ou une branche d’activité. Il peut recouvrir la totalité des salariés ou une fraction, le plus souvent les cadres. Toutes les personnes incluses dans le champ sont couvertes par le régime. Le second pilier est de nature contractuelle par accord avec les partenaires sociaux de l’entreprise ou de la branche et d’un pays à l’autre, le nombre de citoyens couverts par un tel régime varie.
Géré en capitalisation
Tout au long de sa carrière, avec souvent une notion d’ancienneté minimum, le salarié verse des cotisations, abondées par l’entreprises et accumulées dans des fonds de pension. Les capitaux du fonds sont investis sur les marchés financiers, engrangent les gains et pertes et au moment du départ en retraite, déterminent le montant de la pension qui va être versé.
Prestation définie ou cotisation définie
Historiquement, ce type de régime a été mis en place plutôt dans de grandes entreprises et il garantissait que la pension soit clairement définie, le plus souvent une fraction de la dernière rémunération au prorata de la durée des services.
L’instabilité des marchés financiers de ces dernières années a mis à mal un certain nombre des fonds de pension (Grande Bretagne, Etats-Unis, Pays-Bas…). La crise n’a pas épargné les entreprises, certaines ont fait faillite ou n’ont pas eu la possibilité de compléter les ressources de leur fonds de pension qui ont dû cesser ou réduire les pensions versées.
On observe maintenant une forte tendance à abandonner ce régime à prestation définie pour adopter un régime à cotisation définie. Dans ce dernier régime, le montant de la pension dépend de ce qu’a été le résultat des placements effectués par les gestionnaires du fonds et non de la garantie donnée par l’entreprise (ou la branche) dans le cadre du règlement. Le risque financier passe ainsi de l’entreprise au retraité.
Le troisième pilier
Individuel
L’adhésion à un régime de retraite de troisième pilier ne peut résulter que d’une décision individuelle et par nature, ce régime ne peut être géré qu’en capitalisation.
Epargne ou retraite
Les régimes de troisième pilier sont de toute évidence des systèmes d’épargne : un particulier décide de s’abstenir de consommer une partie de ses avoirs. Les motifs de cette décision sont variables à l’infini et la perspective d’améliorer ses revenus de retraite est en rivalité avec l’achat d’une voiture, d’un appartement, constituer la dot de ses filles, préfinancer un voyage… On s’accorde en général à dire qu’un vrai régime de troisième pilier de retraite doit prévoir une sortie en rente et non en capital et ne peut être liquidé qu’à l’occasion du départ en retraite, mais cette segmentation est loin d’être absolue.
Rôle de la fiscalité
Comme pour tout dispositif d’épargne, la puissance publique est toujours intéressée de veiller à limiter les manœuvres d’ »évitement fiscal » qui sont la face légale de la fraude fiscale. Elle a aussi légitimement le souci de surveiller la collecte et la gestion de l’épargne, à la fois pour protéger les épargnants et pour que celle-ci soit utilisée pour le bien du pays.
Intra-entreprise ou non
Ces régimes sont proposés par les organismes financiers ou d’assurance, mais il est possible que l’entreprise, dans le souci de proposer un service à ses salariés, facilite en son sein l’adhésion à un tel régime en acceptant par exemple d’effectuer le prélèvement des cotisations ou en accordant un abondement. Le caractère individuel de l’adhésion n’interdit pas d’y procéder.
Cette présentation très schématique ne rend compte d’aucun système réel de retraite dans aucun pays. Elle présente comme avantage de proposer un guide de pensée permettant de décrire chaque système national et d’identifier ses particularités. C’est ce que nous allons faire maintenant à propos du système français.
La caractéristique essentielle du système français est sa complexité avec ses 38 régimes différents.
Premier pilier
Le terme retenu en France est « régime de base » et il n’existe pas un régime de base, mais des régimes de base répondant chacun, au moins en partie à la définition générale.
Ils ont un caractère universel et obligatoire, mais ils ne s’appliquent chacun qu’à une fraction de la population : les salariés du privé, les fonctionnaires (en réalité, il y en 4 : fonctionnaires d’Etat, des collectivités locales, de l’hôpital et celui des ouvriers de l’Etat), les professions libérales, les artisans et commerçants WWWW
Ils sont tous gérés en répartition
Le plus connu et le plus important numériquement est celui des salariés du privé géré par la CNAV
Article paru dans le Courrier des retraités Décembre 2012
Lien vers le site : http://www.retraites-ufr.com