De plus en plus numérisée, après les chèques, notre société restreint l’utilisation des espèces, pièces et billets, au profit d’autres modalités de paiement. Certains en viennent à préconiser la suppression complète de ces objets familiers de nos portefeuilles, portemonnaies et tirelires de nos enfants. Faut-il se préparer ?
La France reste en Europe, la championne de l’utilisation des chèques avec 2/3 du total de ceux qui y sont émis. Nous en émettions 80 par an en 1990. 37 seulement en 2013 et la baisse continue. Les banques ne sont pas mécontentes de cette évolution dans la mesure où le traitement de ces centaines de millions de papiers pèse sur leurs frais. Pour accélérer la tendance, elles en sont à faire payer l’émission des chèques.
Parallèlement à la raréfaction du chèque, d’autres méthodes de paiement se sont développées : virements et prélèvements automatiques, cartes bancaires, paiement en ligne avec l’ordinateur, le Smartphone, la tablette, la montre, que sais-je demain ?
Avec ces développements modernes, les relations entre le débiteur et son créancier se sont distendues. Elles sont de plus en plus gérées par l’intermédiaire de machines de plus en plus puissantes. L’image du maquignon au portefeuille gonflé de billets de banques et tapant dans la main de l’éleveur pour concrétiser l’achat du bétail correspond à une époque révolue.
Mais les espèces ont la vie dure même si les espaces de liberté qui leur sont laissés se réduisent. Régulièrement le plafond des dépenses que l’on peut faire en espèces se réduit. Certains pays ont supprimé l’usage des pièces de 1 et 2 centimes. D’autres songent à les imiter. La fabrication des billets de 500 euros auxquels certains pays – Allemagne en tête – sont très attachés est interrompue. Ces billets continueront d’avoir cours légal, mais on peut penser que, du fait de la vétusté, ils finiront par disparaître.
Les arguments des éradicateurs sont connus. Les billets de 500 €, prenant moins de volume que d’autres, créaient des facilités pour la fraude et le crime qu’il était urgent de combattre (si, si, c’est l’argument utilisé). Pour les petites pièces, la désuétude se développe, mais leur disparition, rassurons-nous, ne fera pas obstacle à ce que dans les calculs, il soit toujours fait usage d’autant de décimales que les ordinateurs voudront bien en compter. Au nom de la morale, de l’économie et de la simplicité, nous sommes en train de nous désaccoutumer de l’usage d’outils que nous pouvions utiliser à notre gré sans comptes à rendre.
Demain, ou un peu plus tard, lorsque toutes les transactions, si faible qu’en soit le montant, seront enregistrées dans le Big Data, cette masse d’informations viendra compléter celles déjà fournies et enregistrées par nos téléphones portables. Aux yeux des machines, nous serons devenus transparents, ce pour quoi il n’y a pas lieu de s’inquiéter car nous serons devenus de parfaits citoyens et le Meilleur des mondes sera le nôtre ;
(1) Le meilleur des mondes par Aldoux Huxley, 1931
Article paru dans le Courrier des retraités n° 42 de décembre 2016
Christian Bourreau
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