Dans le cadre des débats actuels sur le changement climatique, est apparu récemment le phénomène du « flygskam » en Suède, popularisé par le « flight shaming » dans le monde entier. Celui-ci peut-il remettre en question l’avenir de l’aviation commerciale ?
Dans les années 50, seule la partie la plus riche de la population pouvait se payer des voyages en avion (d’où le terme de « jet set » pour désigner cette population très aisée). Depuis les voyages en avion se sont largement popularisés. En 2019, la flotte se compose de 24 000 avions de plus de 100 places, et, au cours de 38 millions de vols, 4,6 milliards de passagers ont été transportés. Actuellement, on estime à 3,5% le développement annuel du nombre de passagers, soit un doublement en 20 ans.
La pollution des avions
On savait évidemment que les avions polluaient et il peut paraître étonnant que ce problème soit apparu si tardivement dans le début sur le changement climatique. C’est qu’en réalité, l’aviation n’est responsable que d’environ 2,5 à 3% des émissions de CO2, Cela représente environ 15% de la pollution due aux transports. C’est évidemment un chiffre non négligeable, mais qui peut paraître secondaire par rapport à la pollution des automobiles, des camions et des navires. D’autant que si une énergie non carbonée est possible pour les transports terrestres, cela paraît actuellement difficilement envisageable pour l’aviation commerciale.
Par ailleurs, des efforts ont été faits pour rendre les avions moins polluants : entre 2000 et 2017, le trafic a augmenté de 54% alors que les émissions de CO2 n’ont augmenté que de 14%. Air France s’est engagée à assurer une croissance neutre en carbone à compter de 2020. Certaines compagnies proposent déjà aux clients de compenser la pollution liée à leur voyage en finançant des programmes de reforestration.
Les effets actuels du flight shaming
En Suède, une baisse de 8,7% de passagers pour les vols intérieurs (2,6% pour les vols internationaux) a été observée sur les sept premiers mois de 2019. Simultanément, le nombre de passagers prenant le train a augmenté de 8%.
Si, actuellement, aucun chiffre n’est connu pour les autres pays, le débat est maintenant clairement ouvert. Aux USA, un projet de loi de « Green New Deal » a été déposé, demandant aux Etats Unis de construire un réseau ferroviaire à grande vitesse. En France, certains députés ont proposé d’interdire les vols intérieurs lorsque le trajet pouvait facilement être effectué par le TGV (Paris-Lyon, Paris-Strasbourg …).
Une augmentation prévisible du prix des billets
Une des anomalies relevées par les opposants à l’avion est que le kérosène n’est pas taxé. En raison de la concurrence, il arrive même souvent que le prix d’un voyage en avion soit moins élevé que le même voyage en train alors que ce moyen de transport pollue 20 fois moins.
En France, la ministre des transports, Elisabeth Borne, a annoncé, le 9 juillet, la création d’une éco contribution du transport aérien. Elle devrait etre mise en oeuvre à partir de 2020.
Au niveau européen, le Conseil des ministres des transports, réuni à Luxembourg le 6 juin 2019, a lancé une étude sur des pistes renforçant le principe pollueur payeur : taxe sur le kérosène, charge sur les billets et sur les vols, renforcement du marché du carbone européen.
Un risque pour le développement du transport aérien ?
Actuellement, l’influence du phénomène de flight shaming est limitée. Les dernières prévisions des constructeurs, sur la réduction des nuisances et sur l’augmentation du trafic, restent optimistes. Cependant, sauf révolution technologique majeure, le risque est élevé que la pollution soit à terme un frein au développement du transport aérien
Article paru dans le Courrier des retraités n° 55
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