Aux Antilles, Noël est une fête riche en traditions et en saveurs, profondément ancrée dans l’histoire et la culture créole. Magaly et Guy, septuagénaires, nous racontent le Noël de leur enfance.
Magaly Gabriel-Frédéric
Quand Noël me vient à l’esprit, je vois tout de suite notre arbre de Noël. Mon père le fabriquait avec trois branches de glicéridias, quelques ballons et une guirlande qui revenait chaque année. L’odeur des feuilles desséchées reste gravée dans ma mémoire. Cet arbre restait avec nous jusqu’à l’Épiphanie.
Je me souviens aussi du jambon enveloppé dans un tissu écru, qu’il fallait faire tremper plus de trois jours pour le dessaler avant de le faire bouillir. Rien ne se perdait : la peau et l’os principal étaient conservés pour préparer la soupe calalou en janvier et la couenne servait à parfumer les lentilles.
Les jouets n’étaient pas une question de choix car nos moyens financiers étaient limités. Nous nous contentions de ce que nous avions, et parfois, la générosité des voisins plus nantis venait égayer notre Noël.
Nous étions sept enfants dans la fratrie et nous passions de merveilleux moments en famille. La messe de minuit était un moment fort : nous y allions à pied, entourés de nos voisins et c’était une vraie fête. Le retour était plus rapide et animé car nous étions impatients de partager le repas d’après la messe.
Le lendemain, dès l’aube, il fallait déjà repartir à l’église pour assister aux trois messes de Noël.
Je garde de très bons souvenirs d’enfance de cette période. Nous respections beaucoup les petits cadeaux que nous avions eus. Ils devenaient des trophées que mere conservait dans son armoire.
C’était la belle vie.
Guy Massee
Les préparatifs commençaient bien avant Noël. Nos parents faisaient macérer des pelures d’orange pour fabriquer le fameux schrub, une liqueur traditionnelle dont les saveurs variaient d’une famille à l’autre.
Quant à nous, les enfants, on se rassemblait près du monument aux morts de la ville, assis sur les bordures en ciment et on chantait à tue-tête des cantiques de Noël et des ritournelles. Nos instruments étaient faits maison : des boîtes de conserve vides, des bouteilles en verre et des « chachas » fabriqués avec des petites calebasses. À mesure que Noël approchait, notre ferveur et l’intensité de nos chants ne faisaient qu’augmenter !
Le 24 décembre marquait le point culminant des festivités avec la traditionnelle fête du cochon. Chez nous, dès la veille, on s’activait en cuisine pour préparer les oignons et les épices destinés au fameux boudin créole. C’était un véritable échange entre voisins : ils nous apportaient une torche de leur boudin et nous leur offrions le nôtre.
Le soir venu, il fallait se préparer pour la messe de minuit dont nous attendions vivement la fin car c’était le prélude aux festivités.
Le repas de Noël était un moment magique ! Au menu, nous avions du boudin créole, du ragoût de porc, des pois d’angole, des ignames, des pâtés de cochon et le jambon de Noël, préalablement dessalé puis préparé avec du sucre roux et des morceaux d’ananas. Ce mélange de sucré et de salé avait un goût absolument inoubliable.
Après le repas, la fête continuait dans les rues. Nous faisions la tournée des maisons, chantant des ritournelles et entraînant avec nous de plus en plus de monde. Les habitants nous accueillaient avec des rafraîchissements et des petits plats comme du jambon, des pâtés ou encore des liqueurs. L’ambiance était festive et on tenait ce rythme jusqu’au lever du jour.
Au petit matin, nous rentrions à la maison, souvent accompagnés d’amis, pour savourer un riz au chocolat préparé par ma mère. C’était notre manière de clore cette nuit d’effervescence, remplie de joie et de partage.
Pourquoi Noël est-il si spécial selon vous ?
Pour plusieurs raisons.
D’abord, c’est un véritable mélange de cultures. Les traditions africaines, européennes et amérindiennes s’entremêlent pour donner naissance à un Noël unique, où la spiritualité cohabite avec une joie de vivre exceptionnelle.
Ensuite, c’était avant tout un moment de partage. Noël est l’occasion de se rassembler en famille, entre amis et même entre voisins. On vivait un esprit de solidarité et de convivialité qui rendait cette période particulièrement chaleureuse.
Enfin, c’est une célébration de la vie. Malgré les défis du quotidien, Noël marquait une période de fête et d’espoir. Les Antilles s’illuminaient de mille feux, et la joie se ressentait partout.
Pensez-vous que l’ambiance de Noël a changé avec le temps ?
Elle a évolué mais l’esprit reste intact. Les traditions continuent de se transmettre, même si elles s’adaptent à la modernité. Les familles se réunissent toujours pour partager des repas festifs et chanter des cantiques. Aujourd’hui, il y a ces grands rassemblements organisés par des groupes musicaux pendant lesquels on chante Noël en prélude au 24 décembre.
La rédaction vous conseille
Repas de Noël : idées gourmandes et festives pour épater vos invités
Les repas de Noël sont des moments privilégiés qui rassemblent famille et/ou amis autour de mets savoureux. Pour rendre cette soirée inoubliable, vous devez ainsi concocter des plats qui émerveilleront vos convives. Des boissons aux plats principaux et aux desserts, nous vous proposons une sélection d’idées gourmandes pour impressionner vos hôtes. Offrez un accueil chaleureux […]