Quelles sont les difficultés rencontrées par les aidants familiaux ?
Réponse de M. Miguel Chamoiseau, vice-président de l’association France Alzheimer Martinique.
Dans leur grande majorité, les aidants expriment ressentir de la fatigue physique. L’accompagnement quotidien de la personne malade conduit notamment à une dégradation de la qualité et de la durée du sommeil. Il retentit également sur l’alimentation et sur l’attention portée à soi.
En plus de difficultés professionnelles accrues lorsqu’il travaille, l’aidant principal subit souvent un processus de marginalisation sociale : les aidants font très souvent part d’une diminution de la fréquence de leurs relations avec la famille ou les amis et plus des deux-tiers indiquent que leurs activités associatives ou de loisirs ont cessé ou diminué. Ils sont menacés, tant par la solitude que par l’épuisement.
En outre, les aidants familiaux ont peur de l’effacement progressif de la personnalité (lié à l’Alzheimer) et de l’inéluctable déclin du malade qu’ils accompagnent. Ils redoutent de ne plus avoir un jour les ressources physiques pour l’accompagner jusqu’au bout. Ils craignent aussi de ne pas pouvoir faire face aux coûts financiers croissants engendrés par une dépendance accentuée.
Comment « aider les aidants familiaux » ?
L’assistance à la personne malade expose donc les aidants à des problèmes de santé physiques et psychologiques et surtout au risque de dépression : ils doivent bénéficier d’un soutien particulier et d’une prise en charge adaptée. On a vu que le monde associatif qui s’est déjà mobilisé, doit le faire plus encore.
Sur un plan plus général, le rôle des aidants familiaux a été reconnu avec la loi du 11 février 2005. La mise en place d’un congé de soutien familial constitue une innovation à la portée encore limitée. L’accompagnement des aidants par les pouvoirs publics est encore insuffisant au regard de leur investissement auprès des personnes malades.
Interview de Mme Marie-Joëlle Bazin, psychologue clinicienne, Docteur en psychologie et psychopathologie
Comment vivent-ils cette période si particulière ?
Les aidants familiaux à l’épreuve du confinement
La Covid 19 et le confinement ont impacté de manières différentes les familles martiniquaises.
Mais avec la présence d’un malade Alzheimer, beaucoup d’aidants familiaux ont vécu « un enfer » comme certains l’ont verbalisé !
L’association France Alzheimer Martinique a mis en place durant le confinement une cellule d’écoute pour les familles. Durant cette période, du lundi au samedi, 143 appels ont été pris en charge par une psychologue. Les motifs étaient divers mais, de maniéré invariable, on a constaté le même dénominateur commun à savoir, la souffrance ainsi qu’un niveau de stress et d’angoisse très élevé.
Á la question « sur une échelle de 0 à 10, à combien évaluez-vous votre mal-être » toutes les réponses se situaient entre 6 et 10. Cela s’explique par l’augmentation des troubles du malade et l’isolement dans un climat très anxiogène.
Les motifs les plus fréquents sont les suivants :
- Absence d’auxiliaire de vie, par rapport au confinement.
- Augmentation des troubles du malade.
- Appel au secours par rapport à l’agressivité du malade.
- Appel au secours suite à la fugue du malade.
- Demandes de guidance par rapport à la prise en charge du malade.
- Plaintes par rapport à l’absence de visites des enfants et à l’isolement.
- Plaintes par rapport à l’APA non versée.
- Demandes de masques et de gants.
- Demande d’information sur la maladie d’Alzheimer et sur les signes car le confinement a révélé certains troubles au quotidien.
- Demandes d’information sur les démarches médicales et administratives.
- Demandes d’aide matérielle et logistique.
- Besoin de verbaliser le vécu et d’être écouté.
- Demande pour de la formation et des groupes de parole.
Les appels ont également mis en évidence la révélation de la maladie d’Alzheimer pour certaines familles. En effet, le confinement a permis de constater au quotidien des troubles relevant de la symptomatologie de la maladie d’Alzheimer. Pour citer une appelante : « le confinement m’oblige à sortir du déni. Ma mère, cette maitresse femme, je ne la reconnais plus ! ».
Le temps d’écoute a été très positif pour les appelants qui ont tous déclaré très spontanément ressentir un mieux être à la fin de l’entretien. Avec certains, des exercices de respiration se sont avérés utiles pour diminuer les émotions négatives.
L’écoute a permis d’orienter certaines personnes vers des psychologues pour un suivi, vers des psychiatres pour la prise en charge d’une dépression ou encore vers France Alzheimer Martinique pour un accompagnement, car, il faut le préciser, beaucoup de personnes s’adressaient à l’Association pour la première fois.
Contact de l’association
E-mail : [email protected]
Page Internet : francealzheimer.org/martinique