Décembre est bel et bien arrivé, c’est la saison des Chanté Nwèl, une tradition martiniquaise intergénérationnelle. Avec cette petite brise légère des alizés le soir le rythme saccadé du tambour et le cliquetis du ti-bwa qu’on entend au loin (faire une phrase)
En Martinique, Noël ne se résume pas aux cadeaux. C’est avant tout une vibration, un moment de partage spirituel et festif qui résonne dans nos communes, de Grand-Rivière à Sainte-Anne. Pour nous, seniors, c’est l’occasion rêvée de renouer avec nos souvenirs d’enfance tout en transmettant ce patrimoine inestimable aux plus jeunes.
Alors, sortez vos cantiques, préparez vos cordes vocales et an nou alè !
Quand le sacré rencontre le rythme
Le Chanté Nwèl est une alchimie unique. À l’origine, il s’agissait de cantiques catholiques classiques, venus de la vieille Europe, avec leurs paroles en vieux français (le fameux « Il est né le divin enfant » ou « Les Anges dans nos campagnes »).
Mais ici, pas question de rester figé ! Au fil des décennies, nos ancêtres ont insufflé à ces hymnes l’âme de la Martinique. Les paroles sont restées pieuses, mais le rythme, lui, est devenu biguine, mazurka ou valse créole. C’est ce mélange savoureux entre le respect du texte sacré et la ferveur des rythmes africains et caribéens qui donne cette énergie si particulière. Ce n’est pas un concert où l’on écoute passivement : c’est une communion où tout le monde est acteur.
Les ingrédients indispensables d’une veillée réussie
Pour qu’un Chanté Nwèl prenne vie, il faut trois ingrédients clés : de la musique, de la nourriture et de la chaleur humaine.
1. L’orchestre traditionnel
Même si les synthétiseurs modernes s’invitent parfois, l’âme de la soirée repose sur des instruments bien précis.
- Le Tambour (Bèlè ou ka) : C’est le cœur battant de la soirée.
- Le Ti-bwa : Ce petit morceau de bambou frappé à l’arrière du tambour qui donne la cadence.
- Le Cha-Cha (ou Syak) : Pour accompagner le mouvement.
2. La gastronomie : le réconfort après l’effort
On ne chante pas le ventre vide ! Le Chanté Nwèl rime naturellement avec des saveurs de notre terroir. C’est le moment de savourer :
- Le traditionnel boudin créole (rouge ou blanc), pimenté juste comme il faut.
- Le jambon de Noël, caramélisé à l’ananas ou cuit au four.
- Les pois d’angole, la star des légumineuses de décembre.
- Et pour s’éclaircir la voix (avec modération !), le fameux Shrubb, cette liqueur d’écorces d’orange qui a macéré au soleil.
Le rôle clé des seniors : transmettre le flambeau
C’est ici que vous, chers lecteurs d’Happy Silvers, avez un rôle essentiel à jouer. Dans les soirées « Ribote » ou les grands rassemblements publics, on voit souvent les jeunes hésiter sur les paroles du couplet numéro 4 de « Joseph mon cher fidèle ».
Vous êtes la mémoire vivante de ces chants. C’est vous qui connaissez les nuances, les refrains oubliés et l’art de lancer un « Alé viré ! » au bon moment. Emmener vos petits-enfants à un Chanté Nwèl, c’est leur offrir bien plus qu’une soirée : c’est leur donner des racines. Voir un grand-père au tambour et sa petite-fille au ti-bwa est l’une des plus belles images de nos fêtes de fin d’année.
Nos conseils pour en profiter en toute sérénité
L’ambiance est là, mais il faut penser à votre confort pour tenir jusqu’au bout de la nuit (ou au moins jusqu’à minuit !). Nous avons concocté spécialement pour vous ces quelques astuces pratiques :
- Tout d’abord, le fameux livret : n’oubliez pas votre carnet de cantiques (« Cantiques de Noël »). Même si vous connaissez les airs, les paroles nous jouent parfois des tours. Si vous ne l’avez plus, de nombreuses versions sont téléchargeables sur tablette ou smartphone (une bonne occasion d’utiliser vos compétences numériques !).
- Ensuite, la sécurité et le transport : les lieux de rassemblement peuvent être éloignés ou difficiles d’accès le soir. Privilégiez le covoiturage avec des voisins ou la famille. C’est plus convivial et plus sûr.
- Puis, pensez à votre confort avant tout : certaines veillées se font debout ou sur des bancs un peu rudes. N’hésitez pas à emmener votre petit coussin ou même votre chaise pliante si c’est en extérieur.
- Et enfin, il ne faut pas négliger la santé : entre la chaleur de la foule et l’excitation, pensez à boire de l’eau régulièrement. Et attention au sel dans le boudin et au sucre dans le Shrubb, profitez-en avec sagesse !
Le Chanté Nwèl est une preuve magnifique que bien vieillir en Martinique, c’est surtout rester connecté à sa culture et aux autres. Que vous soyez dans une grande assemblée à Fort-de-France ou en petit comité sur une terrasse au François, laissez votre joie éclater.
Joyeux Chanté Nwèl à tous !
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