Rencontre pour faire le point sur le bien-être des personnes âgées avec le Dr Didier Chatot-Henry, Président de l’IREPS (Instance Régionale d’Education et de Promotion de la Santé) de Martinique, Président de la Commission Spécialisée Prévention de la Conférence Régionale de la Santé et de l’Autonomie.
Comment définir la promotion de la santé ?
Ce concept a une trentaine d’années mais reste encore méconnu. Cela est dû en partie à une mauvaise définition du terme santé. Notre société l’associe à l’absence de maladie. Cette approche a une limite. Pouvons-nous certifier qu’une personne est exempte de tout processus dégénératif, de toute pathologie alors que notre corps est soumis à des agressions auxquelles s’ajoute notre patrimoine génétique prédisposant à certaines pathologies ? Il en est de même pour le vieillissement naturel qui nous fragilise. Cette définition primaire place la santé comme un but inatteignable, une utopie.
L’Organisation Mondiale de la Santé en donne une définition en 1946 en introduisant une dimension plus large : « Etat de bien être physique, mental et social… ». En 1986, elle va plus loin avec la charte d’Ottawa où la santé est perçue comme un moyen et non un but. Chaque individu peut se dire : comment puis-je m’épanouir dans mon environnement avec la ressource « santé » dont je dispose. La promotion de la santé fait ses premiers pas.
Les déterminants de la santé macro-sociaux (conditions économiques, culturelles, environnementales, de vie et de travail, logement, chômage, milieux de vie…) ont plus d’influence sur l’état de santé que les comportements personnels ou les soins médicaux. Les inégalités sociales de santé deviennent LA priorité des politiques de santé publique.
Cette définition plus juste de la santé ébranle nos certitudes car place la société, les collectivités locales et l’Etat au premier plan de la responsabilité de la santé individuelle.
Quelles actions sont mises en place par l’IREPS pour répondre à cette thématique sur le terrain ?
C’est une association loi 1901 liée à une fédération nationale qui regroupe les 26 IREPS.
Elle se positionne comme soutien aux politiques de santé publique, essentiellement auprès de l’Agence Régionale de Santé et des collectivités locales désireuses d’être aidées et comme appui méthodologique et réflexif auprès de toute association souhaitant écrire et mettre en place un projet de promotion de la santé.
Nous intervenons dans un champ d’actions très vaste en référence à la charte d’Ottawa :
- Elaborer une politique publique saine
- Créer des milieux de vie favorables
- Renforcer l’action communautaire
- Acquérir des aptitudes individuelles
- Réorienter les services de santé
- Entrer dans l’avenir
- Notre démarche est dans la bienveillance et le respect des choix individuels.
Nous oeuvrons essentiellement à monter en compétences les professionnels et acteurs de terrain afin de rendre leurs projets plus efficients et efficaces (formations sur la méthodologie de projet et les données probantes, sur les compétences psychosociales, l’éducation thérapeutique du patient, le partage d’expérience). Nous réalisons des plaidoyers de promotion de la santé destinés aux élus pour les sensibiliser sur leur rôle important dans la santé de leurs administrés à travers la réalisation de trottoirs, de pistes cyclables, d’espaces piétonniers, de parcours santé, d’organisation des transports en commun …
Nous portons aussi des actions de terrain comme le programme des jardins familiaux (JAFA) en réponse à la problématique chlordécone ou le projet de prévention de l’obésité des enfants en milieu scolaire …
La population senior a – pour une partie d’entre elle – une vulnérabilité voire une précarité au quotidien : comment les sensibiliser à une « meilleure santé » ?
Notre projection dans l’avenir évolue en fonction de notre âge, de nos ressources physiques, matérielles, culturelles, sociales et de nos croyances. Notre santé est déterminée par ces composantes.
Les seniors y sont sensibilisés car ils sont confrontés par des « petits soucis » conduisant souvent à une prise médicamenteuse. Mais l’impact prépondérant est l’isolement social progressif. La diminution des relations humaines, les difficultés de mobilité accentuées par un réseau de transport collectif peu adapté, l’accès compliqué aux services de proximité par défaut de trottoirs, des parcours santé en dehors des bourgs sont autant de facteurs négatifs à la santé associés à des revenus financiers faibles.
Accéder à « une meilleure santé » pour les seniors, c’est d’abord mobiliser nos pouvoirs publics pour créer des milieux de vie favorables.
Des actions de proximité sont mises en place mais doivent être confortées et étendues. D’où la place importante des structures et associations comme Happy Silvers, Neugeron … qui focalisent leurs actions sur les seniors et leurs proches.
Quels sont vos partenaires ?
Cette question rejoint la première. La formation des professionnels de proximité, la sensibilisation des pouvoirs publics sont des leviers considérables.
La politique de territorialisation de l’ARS, que nous soutenons, permet de mobiliser les acteurs des quatre territoires de façon cohérente, plus efficace et plus efficiente.
Tout ne sera pas réglé par « baguette magique » mais chaque versant d’une problématique sera mieux pris en compte en cohésion collective. Les CCAS, la politique de la ville et les ateliers santé ville, les contrats locaux de santé, les communautés de communes, les professionnels de santé et du médico-social, les associations… adoptent un objectif et essaient de l’atteindre.