Rencontre avec le Docteur Chatot-Henry, gériatre.
Qu’est-ce qu’un gériatre ?
Un gériatre est un médecin spécialiste qui s’occupe des maladies des personnes âgées. Avec l’augmentation de l’espérance de vie, la gériatrie est une spécialité en pleine expansion. C’est une discipline complexe qui prend la personne âgée dans sa globalité à savoir médico-psycho-sociale. En effet, l’environnement du patient est essentiel pour répondre aux besoins de celui-ci.
Le gériatre s’interroge sur une multitude de paramètres pour la meilleure prise de décision : les différentes insuffisances d’organe (cardiaque, rénale ou hépatique), les troubles sensoriels (malvoyance, surdité, etc.), les troubles cognitifs… La famille est régulièrement concertée pour étayer une prise en charge adaptée au degré de dépendance.
L’objectif de la gériatrie est bien sûr de soigner mais aussi de prévenir la perte des capacités liées à l’âge jusqu’à la dépendance. Accompagner dans toute sa globalité un parcours de vie qui se terminera au mieux dans les conditions que le malade a choisi (directions anticipées). La promotion de la Santé des personnes âgées est d’améliorer la qualité des années de vie restantes afin d’assurer le plus longtemps possible l’autonomie de ces personnes. Les études le prouvent : une modification comportementale est bénéfique même à un âge avancé (1).
Il est aussi important de reconnaître les besoins des patients et d’y répondre par un regard « multidisciplinaire », une convergence de métiers soignants, pour optimiser des capacités restantes quelque soit l’âge. Le parcours de santé sera alors au cœur de la prise en charge du patient, lui-même acteur de ses choix.
Dans quel cadre intervenez-vous ?
Le gériatre exerce le plus souvent dans des services hospitaliers, des établissements de soins de suite ou de réadaptation (SSR), des maisons de retraite ou un établissement pour personnes dépendante (EHPAD). Il peut également exercer dans un cabinet privé.
Qu’est-ce que la consultation mémoire et à quel moment faut-il consulter ?
La consultation mémoire fait suite à des oublis persistants et inquiétants pour le patient ou l’entourage. Elle permet de rassurer sur de possibles oublis liés à l’âge, mais aussi de poser certains diagnostics comme les troubles cognitifs de légers à sévères. Elle peut être pratiquée par des médecins gériatres, des neurologues ou des psychiatres. Le médecin généraliste peut lui même dépister les troubles de la mémoire et envoyé le patient selon les résultats qu’il a trouvé. Pour les spécialistes que nous sommes, nous nous entourons régulièrement de bilans approfondis que font les neuropsychologues. Ils réalisent une prise en charge globale que ce soit du patient ou de l’aidant. Ce sont de véritables référents pour les troubles cognitifs des personnes âgées, mais aussi dans d’autres domaines (dépression, troubles des traumatisés crâniens, des maladies chroniques.. etc). Ils sont avant tout psychologues cliniciens.
La consultation pourrait être réalisée devant tout tableau clinique ou mnésique qui interpelle… sachant que le patient lui-même n’est pas conscient de ses troubles. D’où une difficulté supplémentaire s’il y a isolement social.
On remarque sur le territoire que la 1ere consultation a lieu très souvent tardivement : par méconnaissance peut-être des signes d’alerte de la maladie d’Alzheimer, du délai pour l’obtention d’une consultation ou plus simplement d’un déni familial…? Les trois consultations mémoire (Mangot-Vulcin, Saint Esprit, Fort-de France) sont de plus en plus sollicitées par les médecins généralistes se sentant dépourvus devant les troubles psycho-comportementaux de leurs patients atteints de troubles cognitifs.
Par contre, il n’est pas question de proposer un dépistage systématique pour une maladie neuro-dégénérative dont le traitement curatif n’existe pas à ce jour. Les traitements sont palliatifs : un accompagnement est nécessaire dans la globalité de la maladie, quand elle est diagnostiquée. C’est une prise en charge multidisciplinaire du patient, de son environnement et de l’aidant qui permet le plus souvent un maintien à domicile. Ces aidants familiaux sont de vrais piliers dans le plan de soins individualisé proposé après une consultation mémoire, surtout s’il s’agit d’une maladie d’Alzheimer. La compréhension de la maladie est essentielle par l’aidant qui a un rôle primordial dans la ligne des soins.
Le bilan clinique peut se poursuivre aussi en hôpital de jour gériatrique, structure d’évaluation, de diagnostic et de prévention. D’autres corps de métiers complètent la prise en charge du patient et donnent lieu à une évaluation gériatrique standardisée où la fragilité par exemple peut être dépistée.
Quels conseils donneriez-vous aux seniors afin de bien vieillir ?
Dirais-je que c’est oser être Heureux…
Inexorablement le corps – en perte de capacités – lors du vieillissement doit s’adapter, répondre à des changements, « faire avec » un nouveau regard et trouver un équilibre… Aussi bien vieillir ne peut être que l’acceptation d’un état en « devenir » mais aussi un état « d’avoir été ».
Bien Vieillir, cela peut être : être bien dans son corps, dans sa tête, dans son assiette,
dans sa relation avec les autres, dans son esprit, dans son rythme.
Car quel que soit l’âge, il y a toujours un bout de chemin à faire.
Même petit, il reste à faire.
(1) Claudia Kesslera, Ralph M. Steinmannb – Promotion de la santé des personnes âgées – PRIMARYCARE – Le journal suisse des médecins de premiers recours 2015