Billet (de mauvaise ?) d’humeur. Les chiffres sont là : en 2006, plus de 44 % de la population martiniquaise avaient moins de 20 ans (contre 37,6 % dans l’hexagone). En 2014, près d’un quart des Martiniquais avaient 60 ans et plus. En 2030, ils seront 34 % et 40 % en 2040 !
En Martinique, en Guadeloupe et à la Réunion, nous devrons affronter le même problème à savoir un vieillissement accéléré même si le phénomène est moindre à la Réunion mais avec des effectifs plus importants. Les causes sont multiples et se résument en 4 points :
- De moins en moins d’enfants du fait de la baisse de la natalité
- Un allongement de la durée de vie
- Une émigration des jeunes actifs (hommes et femmes)
- Un retour pour leur retraite de ceux qui ont quitté le département dans les années 60 – 70
Il n’y aura pas de solution à cette équation « Vieillissement accéléré » aux multiples variables si nous ne faisons rien dans les années à venir voire immédiatement.
Si les seniors de plus de 60 ans sont dans leur grande majorité autonomes (93 %), la prise en charge de la dépendance doit être rapidement prise en compte : le nombre de personnes âgées de 80 ans et plus, les plus concernés par la dépendance, sera multipliée par 3,5 en 2040 soit 12 % de la population.
Les seniors vivent principalement à domicile et plus d’un tiers était seul en 2012.
Le coût de la dépendance
Le coût de la dépendance est important que l’on soit à domicile ou en institution. Se posera alors le véritable problème de la gestion (physique, morale et financière) de la dépendance. Les solutions résideraient-elles dans :
- Plus de prévention de la part des seniors encore actifs pour retarder ou éviter autant que possible la dépendance ? Cela se traduit par faire du sport, mieux s’alimenter et garder du lien social. Certainement !
- Une préparation financière de sa retraite (quand les revenus le permettent) ?
- Un meilleur aménagement de son domicile pour prévenir les chutes et l’adapter à son futur vieillissement ?
- Des assurances privées à contracter dès que possible comme une assurance dépendance quand les ressources financières le permettent ?
- Le développement d’une hospitalisation à domicile ou en institution ? …
Les solutions sont sûrement multiples et toutes ne sont pas listées dans cet article.
Les aidants familiaux
Et les aidants familiaux alors ? Ils s’occuperont des seniors dépendants comme ils le font aujourd’hui, me direz-vous ? La population dépendante, majoritairement féminine, doublerait aussi en 2030 pour atteindre 13 000 personnes. La grande majorité des personnes âgées dépendantes vit à domicile. Quand on connaît l’investissement physique et moral des aidants naturels, leur besoin de répit qui a été reconnu par la loi d’adaptation de la société française au vieillissement en application depuis le 1er janvier 2016, la solution ne peut résider ici.
De plus, 40 % des familles sont monoparentales. Ce qui signifie (à mon sens) que les enfants seront tous pleinement sollicités pendant la retraite de leurs parents s’ils n’ont pas de conjoint. Cela paraît-il vraiment réalisable quand on connaît l’évolution de notre société martiniquaise ?
Equipement en établissements d’accueil
Où en est-on au niveau de l’équipement en établissements d’accueil ?
La Martinique manque de structures d’hébergement pour personnes âgées de 75 ans et plus. Le taux d’équipement est beaucoup plus faible que dans l’hexagone. Pour 1000 personnes âgées de 75 ans et plus, on dénombre en 2015 :
- 9,5 places en maison de retraite, logements de logements-foyers, places USLD (unité de soins de longue durée) contre 25,9 dans l’hexagone
- 41,3 places en EHPAD (Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) contre 100,4 dans l’hexagone.
- 12,9 places de services de soins à domicile pour 1 000 personnes âgées de 75 ans et plus (SSIAD + SPASAD) contre 18,8 dans l’hexagone
- 428 places tous établissements confondus
- La solution résiderait-elle dans la construction (massive) d’EHPAD ou autre structure du même type ? Les finances de nos collectivités locales y survivront-elles ?
La silver économie, un marché juteux ?
Devant ce constat, les initiatives fleurissent depuis quelques mois en Martinique. Existerait-il un marché « juteux » de la silver économie ? Que l’on se le dise : selon les chiffres de la CNAV (Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse), 21,8 % des retraités du régime général vivent avec le minimum vieillesse à la Martinique en 2015 contre 3,1 % dans l’hexagone. Le montant moyen des retraites était de 646 euros en 2015.
Pis encore, qui s’occupera de ceux qui sont sans enfant ou encore des seniors âgées handicapés ?
Le vieillissement, un défi à relever
Le vieillissement de notre population est un défi majeur que nous devons tous relever ! Sommes-nous vraiment prêts à y faire face ? Avons-nous vraiment la mesure de ce phénomène ? Peut-être en le répétant encore une dernière fois y arrivons-nous ? D’ici 13 ans, plus de 3 Martiniquais sur 10 auront 60 ans et plus.
C’est bientôt Noël. N’oublions pas nos grands parents et les personnes âgées vivant à domicile ou encore dans une institution. Pourquoi ne pas aller chanter les cantiques de Noël avec eux ? Rien ne leur fera plus plaisir.
Sources :
- Insee – Recensement de la population 2006 et 2013,
- Enquête Migration, familles et vieillissement
- Antianéchos n° 25 2012
- DEPAMAR (DEpendance Personnes Agées MARtinique, 2012)
- Statiss Antilles-Guyane 2015 – ARS Guadeloupe, Martinique et Guyane
- Valentin Marie – Les DOM à l’horizon 2030. Entre migrations, vieillissement et précarité : quel projet de société ?