Florence Grellet, professionnel de santé répond au Docteur Chatot-Henry (Gériatre) à propos de « La médecine chinoise, une autre médecine«
Qu’est-ce que la médecine chinoise ?
La médecine chinoise est une médecine très ancienne (plus de 4 000 ans). Il s’agit d’une médecine savante qui s’appuie sur des milliers d’ouvrages écrits au fil des siècles. Elle est donc fondée sur un paradigme propre, se distinguant de la vision occidentale qui découle d’ « une représentation de l’être humain globalement influencée par la révolution mécaniste qui s’est opérée à partir de la Renaissance et qui a conduit à voir l’homme comme une machine dont la connaissance anatomique est essentielle »
Ses particularités sont :
- de considérer le patient dans sa globalité, c’est à dire l’homme à la fois composé d’organes et de viscères mais aussi au sein d’un environnement climatique, psycho-social, affectif
- et d’utiliser une méthode d’investigation rigoureuse au vu de l’état du patient au moment de la consultation.
Elle comporte traditionnellement quatre temps : l’observation (du visage, des yeux, de la langue, de l’apparence corporelle et du maintien, des secreta et des excreta…), l’audition et l’olfaction, l’interrogatoire (les questions d’ordre général et celles sur l’état actuel du patient), la palpation (diagnostic par le pouls).
A partir de ces conclusions, l’on aura recours à une des sept méthodes de diagnostic différentiel qui permet à la fois de préciser la pathologie et ses évolutions possibles.
Une fois le diagnostic établi, le praticien met en pratique une ou plusieurs de ces techniques thérapeutiques :
- la pharmacopée chinoise qui utilise, des substances végétale (racine, feuille, graine, noyau, fleur, rhizome, tige, plante entière…), animale (insectes, reptiles, mues voire déjections…) et minérale.
- Le codex publié par les éditions scientifique et technologique de Shanghaï collige les informations de 5767 produits, utilisés dans le cadre de formules (associations de différents produits référencés), le plus souvent à ingérer après décoction des plantes entières, ou sous forme de poudre soluble dans de l’eau chaude, ou encore en comprimés…
- L’acupuncture ou l’art d’implanter des aiguilles sur des points référencés du corps appartenant à des systèmes organiques.
Historiquement deux théories s’opposent :
- La première met en avant la découverte initiale des points par des siècles d’observation de l’existence de zones plus souples sur le corps au cours de la maladie et la disparition de certains symptômes lors de leur stimulation par le massage ou la chaleur. Ces points ont ensuite fait l’objet d’un référencement puis d’une classification en fonction de leurs caractéristiques et de leurs effets curatifs communs. Enfin, la sensation de propagation à la stimulation a permis de guider la découverte des trajets des méridiens.
- Selon la seconde, c’est la sensation de propagation lors des massages et plus particulièrement les expériences introspectives pendant les pratiques de méditation et de qi gong qui ont permis la découverte des trajets des méridiens, la localisation des points spécifiques n’intervenant que dans un second temps. Cette théorie semble confirmée par la découverte d’un parchemin lors de la fouille d’une tombe de la dynastie des Han occidentaux à Mawangdui qui décrit le trajets de 11 méridiens sans nommer de points.
- Le massage et les mobilisations, pour soulager la douleur par la pression, ramollir les tissus congestionnés, pour redonner de l’amplitude ou même du mouvement à une articulation, pour défaire les adhérences des lésions cicatrisées sur une immobilisation qui ont figé une articulation ;
- Les exercices physiques comme le tai ji chuan ou le qi gong : le premier est avant tout un art martial. Bien qu’ils existent, les bienfaits pour la santé ne font pas partie des buts à atteindre. Il est souvent plus difficile que le qi gong à acquérir notamment dans sa gestuelle (environ 108 mouvements sans compter tous les aspects internes de la pratique).
- Les deux pratiques permettent cependant une amélioration des fonctions respiratoires, digestives, cardio-vasculaires et nerveuses ; une meilleure gestion du stress et des émotions, une mobilisation de tous les liquides du corps (sanguin, interstitiel, synovial, lymphatique et cérébro-spinal) ; un massage interne des organes, une compression/décompression douce du squelette
- La diététique, qui globalement présente une utilisation culinaire des produits du codex de la pharmacopée
Lors du diagnostic, l’observation de la langue (forme, aspect, fissures, couleur, enduit) et la palpation du pouls ont une place particulière pour comprendre l’origine de la maladie ainsi que pour prévoir son évolution.
Ils renseignent sur l’adaptation d’un individu à son environnement climatique et l’état de santé des différentes parties du corps ou de la progression de la maladie dans le corps.
Que soigne la médecine chinoise ?
Contrairement aux idées reçues, la médecine chinoise est une médecine à la fois préventive et curative.
Toutes les maladies aiguës ou chroniques peuvent être traitées par cette dernière. Elle a souvent de très bons résultats sur la douleur, en agissant sur les causes de la maladie selon son paradigme, c’est à dire en éliminant le pathogène qui entraîne un dérèglement du système à l’origine de la douleur par les techniques thérapeutiques dont elle dispose ou en ayant recours à des produits de pharmacopée qui ont une action directe sur la douleur.
Comment se rend-on compte que ça marche ?
La médecine chinoise ne considère pas la simple disparition des symptômes comme une condition suffisante permettant d’affirmer qu’il y a guérison. Le patient doit pouvoir constater une amélioration du tonus général, une meilleure résistance aux attaques extérieures, ou un état psychique plus serein.
La médecine chinoise comporte-t-elle des dangers ?
Il n’y a pas d’acte médical sans risque. S’agissant de la médecine chinoise, les principales problématiques concernent la compétence des praticiens et la qualité de l’enseignement qu’ils ont reçu et les conditions d’asepsie.
Florence Grellet, professionnel de santé
et Dr Chatot Henry Carolle, Gériatre