La maladie d’Alzheimer touche de plus en plus de personnes à travers le monde. Rencontre au salon des seniors à Paris avec une start-up, Alzhohis. Interview réalisée avec la collaboration du Dr Carolle Chatot-Henry, gériatre.
Pouvez-vous nous expliquer la méthodologie pour détecter la maladie d’Alzheimer chez un patient « potentiellement atteint » par votre test de diagnostic moléculaire ALZOHIS ?
Dès la commercialisation du test diagnostique Neuroblood, fin 2017, vous pourrez, sur prescription médicale de votre spécialiste ou d’un centre de mémoire, obtenir un diagnostic sanguin de la maladie d’Alzheimer dès les premiers symptômes.
Le protocole diagnostique Neuroblood est le suivant :
- Le test est prescrit lors d’un rendez-vous « mémoire » avec un médecin spécialiste ou en centre de mémoire, en fonction l’évaluation clinique de son patient.
- Le patient se renddans son laboratoire d’analyses médicales pour effectuer une simple prise de sang.
- Le spécialiste se connecte sur la plateforme Alzohis et saisit les résultats de l’analyse sanguine en ligne.
- Le calcul du score diagnostique est instantané et génère une feuille de résultats détaillés pour une interprétation par le médecin.
Vous parlez de diagnostic précoce :
– est-ce au stade de la plainte mnésique isolée ?
Au stade MCI (mild cognitive impairement)
– est-ce en amont des signes iconographiques décelés par l’IRM cérébrale
Probablement, dans le sens où nous parvenons à identifier des patients dont les scores MMSE sont bons : sup. à 27/30. Néanmoins, il est certain que des études cliniques prospectives et complémentaires doivent être réalisées en comparant rigoureusement les dosages monoamines aux IRM.
Quels sont les « faux positifs » du test ?
Selon les derniers résultats consolidés de l’essai clinique mené sur plus de 550 échantillons-patients avec les hôpitaux de St-Eloi – Pr. Sylvain Lehmann (Montpellier), Saint-Louis – Pr. Garnier (AP-HP, Paris) et Lariboisière – Pr. Paquet et Pr. Huguon (AP-HP, Paris), le nombre de faux positifs est estimé à moins de 5%. Ces faux positifs sont des patients souffrant de démences fronto-temporales. Il ne s’agit en aucun cas de patients sains.
S’agit–il d’un prélèvement sanguin à coupler avec le bilan neuropsychologique, qui reste – pour nous spécialistes – riche d’enseignement ?
Excellente question !
Oui, ce test a pour but de valoriser, de potentialiser, l’examen neuropsychologique en augmentant considérablement la spécificité diagnostique et permettre au médecin de sécuriser plus rapidement son diagnostic final.
Est-il éthique de dépister une maladie chronique et évolutive chez un patient alors qu’il n’y a – à ce jour – aucune guérison possible du processus neuro-dégénératif ?
Ce nouveau test reste un droit pour le patient ; un droit d’être informé sur son état de santé mais ce n’est pas un devoir ou bien une obligation.
Nous revendiquons ce test comme une « possibilité » supplémentaire, pour le patient, d’obtenir une réponse claire et rapide lui permettant de suivre un parcours-patient personnalisé par son médecin-spécialiste, d’adapter son hygiène de vie et enfin de retarder l’apparition des symptômes lourds comme d’anticiper l’impact sur son entourage. Il est certain que ce type de résultat diagnostique peut être perçu comme une double peine (i) détecter la maladie (ii) absence de traitement curatif ; c’est pourquoi Alzohis – à l’instar des associations de patients – prend très à cœur la sensibilisation au diagnostic plus précoce de la maladie.
A titre d’exemple : la plupart des diagnostics génétiques concernent des maladies incurables et peuvent être délivrés à des patients jeunes et pour certains, très en amont des premiers symptômes. La question de l’utilité du diagnostic pour ces quelques 500 pathologies incurables ne s’est jamais posée en ces termes… Pourquoi ? Parce que ce sont des maladies extrêmement rares, de niches, qui mobilisent un nombre moins important de personnes sur la scène publique comme politique. A la différence de la maladie d’Alzheimer qui a été érigée en priorité nationale de santé publique depuis de nombreuses années.
Aussi, un diagnostic plus précoce de la MA semble être « justifié » au regard de l’urgence définie dans les plans Alzheimer successifs et de l’allongement de l’espérance de vie.
- Diagnostiquer plus précocement, c’est créer une fenêtre thérapeutique indispensable pour apprécier l’activité curative de nouveaux médicaments en développement (on dénombre 75 molécules, à l’essai en ce moment dans le monde). Le diagnostic et le développement de nouveaux médicaments curatifs sont donc quasi indissociables.
- Tenter de retarder de 5 ans l’apparition des symptômes lourds, c’est diviser par deux l’incidence mondiale de la MA puisque cette dernière est corrélée à l’âge.
A quand la commercialisation ?
Le test Neuroblood devrait être commercialisé fin 2017. Nous avons d’ores et déjà commencé les démarches auprès des agences règlementaires afin d’obtenir une prise en charge du test, mais ce processus est long.
Est-ce l’espoir aussi de détecter plus tôt la maladie d’Alzheimer et donc de proposer ultérieurement une thérapie stoppant le processus neuro dégératif en amont des symptômes cliniques ?
Oui, sans aucun doute. Or, freiner significativement la progression serait déjà une avancée exceptionnelle pour les malades et leurs familles.
La recherche publique innovante doit être au service des malades et tendre vers une meilleure compréhension de cette pathologie pour espérer, un jour, savoir la guérir.
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